L’école est un cadre propice aux situations d’injustice vis-à-vis des élèves, et en particulier d’injustices épistémiques (Fricker 2011), du fait de leur position structurellement minoritaire. Miranda Fricker distingue deux grandes sortes d’injustice épistémique, testimoniale et herméneutique. La première se produit lorsqu’un témoignage est considéré comme manquant de crédibilité du fait du statut social du locuteur et/ou du fait de la hiérarchie de crédibilité (Becker 1967) dont bénéficient les adultes vis-à-vis des enfants et les personnels scolaires vis-à-vis des publics de l’institution. L’injustice herméneutique, elle, caractérise les situations où un individu n’a pas accès aux ressources conceptuelles qui lui permettraient de comprendre et sa situation. Dans la présente communication, j’appliquerais cette réflexion à la discrimination raciale scolaire. Je suggérerais que la croyance des enseignant·es dans l’idée que les élèves n’auraient pas les concepts pour avoir conscience d’être discriminé·es alimente une injustice testimoniale : au sein même de dispositifs scolaires imaginés pour ouvrir et accueillir la parole des élèves sur la discrimination, iels disqualifient et empêchent la (d)énonciation des discriminations vécues. Je m’appuierais sur des données tirées de participations observantes conduites lors d’une recherche-action dans des établissements du secondaire en France, dans le cadre d’un projet expérimental.